Contenu principal

Message d'alerte

Ce témoignage anonyme a été reçu dans le cadre de l'appel à témoignage que vous pouvez lire ici et nous écrire à Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
 
Témoignage 11
Notre fille de 19 ans est polyhandicapée complètement dépendante et nécessite une surveillance constante jour et nuit. Son état de santé est le résultat d’erreurs médicales ou disons tout simplement de défaut de prise en charge de mon accouchement. Elle vit au sein de sa famille depuis la sortie des soins intensifs en mars 1999 et ce malgré la gravité des séquelles : tétra parésie spastique avec hypotonie du tronc et rigidité des quatre membres, ne tient pas assise, troubles sévères de déglutitions, alimentée par pompe de gastrotomie, déficiente visuelle avec une basse vision, épilepsie pharmaco résistante, pas de communication orale. Nous avons toujours estimé que sa sécurité et sa qualité de vie seraient mieux garanties au domicile qu’au sein d’une institution et ce d’autant plus qu’elle n’a aucun moyen de communication et donc « à la merci des tiers » qui en ont la charge
Depuis les années 2000, nous avons donc eu recours aux aides à domicile et eu l’occasion d’utiliser tous les systèmes pour l’embauche d’un tiers à domicile (l’emploi direct avec déclaration URSSAF mais aussi déclaration CESU, mandataire, prestataire). L’état de santé de notre fille ne s’est pas dégradé, au contraire elle progresse un peu mais les gestes techniques et les contraintes de surveillances restent identiques (à savoir passer le traitement en cours, gérer une pompe de gastrotomie, en cas de crise d’épilepsie le passage du valium par les fesses, surveiller la fièvre et donc gérer les médicaments en cas de fièvre).
En avril 2008 avec l’application de la nouvelle législation PCH enfant, nous avons obtenu un plan d’aide généreux, qui devait nous permettre une vie de famille « pseudo normale ». Notre fille a eu 23 heures de dépendance de reconnue par jour dont 222 heures mensuelles au titre d’un prestataire, le reste en aidant familial avec un déplafonnement des heures.
Le prestataire n’a jamais réussi à assumer la mission de coordination d’un plan d'aide au domicile aussi volumineux. Au départ ce plan d’aide devait permettre aux deux parents de conserver leur emploi, ce qui n’a pas été possible car j’ai du cesser mon activité régulièrement au pied levé pour remplacer les personnels salariés en arrêt et non remplacés (congés, formation, arrêt maladie). J’ai suspendu le paiement des prestations d’avril 2013 à décembre 2013 pour provoquer une réaction de la Direction, mais sans succès. J’ai fait des signalements régulièrement auprès de la MDPH et auprès du service payeur Conseil Général puis j’ai fini par exiger une rencontre au sein de la MDPH. Suspension de l'intervention du prestataire avec la bénédiction de la MDPH, car situation trop difficile du fait des gestes de délégation de soins. Un cadre de la MDPH a tenté d’expliquer qu'il suffisait de faire intervenir les infirmières libérales, ce qui est impossible, et en discours sous-jacent à nous d'accepter une institution avec internat car c’est trop lourd et trop épuisant pour les parents, un discours moralisateur, culpabilisant. Pas raisonnable de notre part en tant que parents : nous mêmes nous allons vieillir et il ne faut pas créer une situation d'urgence car il n'existe pas de solutions et c'est plus facile « de l'habituer jeune à l'institution ». Les seules réponses ont été un listing des institutions.
Un autre prestataire a été sollicité pour tenter de proposer un planning complémentaire mais les problèmes de fond sur la légalité des actes demandés (délégation de soins ne se réglant pas car interdiction de passer le valium en cas de crise), c'est impossible de confier l'accompagnement.
J'ai fini par expliquer devant la MDPH que moi la mère je devais assurer la sécurité de notre fille et que je ne pouvais pas cautionner un dispositif qui la mettrait en danger. Puis j'ai expliqué que j'allais faire de l'emploi direct car l'inspection du travail avait répondu que si toutes les informations sont décrites dans le contrat de façon explicite, le salarié s'engage et engage sa responsabilité en connaissance de cause .
J'ai attiré l'attention à la MDPH que ce n'était pas notre choix de parents de gérer seuls mais pas d'autres alternatives,
Au lieu d’analyser les réelles difficultés aux différents niveaux, le prestataire résume la situation en disant ne pas pouvoir remplir sa mission à cause du profil trop spécifique de notre fille. Pourquoi n’a-t-il rien dit, rien fait jusqu’à cette réunion durant toutes ces années ? A aucun moment le prestataire n’a reconnu ses torts. Il ne pouvait pas ignorer la lourdeur et la spécificité des tâches car avant de basculer le plan Aides Humaines en tout prestataire, ce sont des contrats mandataires qui ont été signés, l’ensemble des gestes spécifiques ont été rédigés.
osé dire les dysfonctionnements, lever l’omerta.
Le service prestataire a finalement défini un ensemble de tâches que le personnel n’aura plus le droit de faire et nous nous sommes retrouvés dans une situation impossible, sans répit, en situation d’aliénation au domicile.
La présence constante au domicile d’un des deux parents a été rendue obligatoire car en moyenne il y a une nécessité d’intervention autour de la gastrotomie toutes les quarante cinq minutes. Nous devions finalement en arriver à payer quelqu’un à regarder régulièrement les aidants familiaux travailler !! Plus de répit familial possible, et de plus j’ai eu droit à la psychologie de comptoir : Mme X, il faudra accepter le handicap de votre enfant et donc l’institution
Nous avons du en plus en payer financièrement le prix, obligés de recourir à l’emploi direct (avec tous les restes à charge et la précarité juridique) pour trouver des alternatives acceptables, de qualité. Mais le prestataire, structure rémunérée au tarif PCH le plus élevé est payé quoi qu’il fasse ; même s’il ne remplit pas correctement ses missions de coordination, il peut poursuivre impunément des missions sans respect pour l’usager, bafouer les droits des salariés en toute impunité.
Pourquoi n’est-il toujours pas possible en France de recourir à des services prestataires de soins et d'aide humaine à la hauteur des enjeux, qui permettent de vivre chez soi, y compris avec une dépendance vitale, sans pour autant reproduire l'institution à domicile, bref de vivre sa vie personnelle et familiale ?